Élodie Saillard (SER) : faire avancer la transition, un amendement à la fois
Comment Élodie Saillard (SER) fait avancer les énergies renouvelables dans la fabrique de la loi en France.
Kevin Gernier analyse les limites du lobbying, ses dérives et les réformes nécessaires pour une démocratie plus transparente.

Dans ce nouvel épisode d’Hémicycle, Kevin Gernier, responsable du plaidoyer chez Transparency International France, revient sur les mécanismes du lobbying, ses zones grises, et les dérives qui menacent la confiance démocratique.
Juriste, ancien collaborateur à l’Assemblée nationale, formé au lobbying et enseignant à Sciences Po Bordeaux, il analyse avec précision les pratiques d’influence dans la fabrique de la loi.
Son constat : le lobbying n’est pas un problème en soi, mais il devient problématique lorsqu’il s’exerce sans règles, sans transparence ou au service d’intérêts économiques opaques.
Kevin Gernier découvre très tôt les questions de déontologie, de corruption et d’influence.
Après un passage par la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique (HATVP), où il participe à la mise en place du répertoire des représentants d’intérêts, il rejoint en 2019 Transparency International France.
Ce parcours l’amène à une double expertise :
Pour Kevin Gernier, « plaider » et « faire du lobbying » ne recouvrent pas la même réalité.
Activité d’influence au service d’un intérêt particulier, souvent économique, avec des moyens importants et des stratégies élaborées.
Action menée par des ONG ou associations pour défendre l’intérêt général, avec des ressources plus limitées et des outils complémentaires : mobilisation citoyenne, alertes publiques, participation aux consultations.
Les deux existent, mais ils ne produisent pas les mêmes effets sur le débat public ni sur la prise de décision.
Kevin insiste :
« Le capital d’un lobby le plus précieux, c’est son capital confiance. »
Lorsqu’un lobby utilise des arguments mensongers, oriente volontairement des responsables publics ou manipule des données, il perd cette crédibilité fondamentale.
L’exemple du lobby des pesticides, sanctionné en 2023 pour des chiffres d’emplois mensongers, illustre la fragilité de cette confiance et la nécessité de sanctions plus fortes.
L’affaire du Qatargate a profondément bouleversé Kevin Gernier.
Il pensait, comme beaucoup, que les « valises de billets » appartenaient au passé.
L’enquête belge a montré l’inverse : corruption directe, cash saisi, pressions d’États étrangers.
Ce scandale rappelle que :
Transparency a comparé les moyens financiers des acteurs de l’influence.
Le résultat est sans appel :
Ce déséquilibre structurel pèse directement sur la fabrique de la loi et sur les débats publics.
Kevin formule plusieurs propositions pour rééquilibrer le système :
Pour tout projet de loi ou décret, en amont de l’arbitrage ministériel.
Entre intérêts économiques et non économiques.
Comme le tabac, où le lobbying économique peut être interdit, conformément aux standards de l’OMS.
Aujourd’hui trop souvent invisibles.
Pour équilibrer les capacités d’expertise.
À Sciences Po Bordeaux, Kevin Jarnier forme les étudiants à analyser :
Son objectif : développer une conscience morale, éviter le cynisme, et rappeler que l’influence implique une responsabilité.
L’entretien met en lumière un paradoxe fort :
nous n’avons jamais eu autant d’outils pour être transparents… et pourtant la décision publique demeure très opaque.
Le lobbying reste légitime lorsqu’il est :
Mais sans règles claires, il devient un terrain fertile pour les dérives — et pour la perte de confiance dans les institutions.